Publié le : 27 juillet 20204 mins de lecture

Pour ma première visite à la Pinacothèque de Paris, il y avait le choix entre la collection des Romanov (la dynastie qui a régné un peu plus de 200 ans sur l’Empire Russe), et celle des Estherazy, grande famille d’aristocrates hongrois. J’avais déjà un peu visité le musée de l’Hermitage à Saint-Petersbourg, dont la première exposition est issue, et je me suis donc dit qu’un approfondissement ne serait pas de trop. Pour ceux qui n’en ont pas eu l’occasion, ça donne un premier bon aperçu du contenu d’un des plus grands musées du monde.

La Pinacothèque se veut être un des premiers nouveaux musées de Paris depuis des décennies; entendez par là « doté d’une collection permanente ». Mais toute la philosophie de l’établissement, rappelée un peu partout, est de mettre en avant l’importance du collectionneur dans la transmission de l’art. Et c’est donc assez naturellement que les expositions temporaires actuelles reflètent cette logique. C’est vrai aussi dans l’organisation de l’expo, avec un accrochage chronologique non pas des œuvres mais des… acquisitions.

On commence effectivement par les acquisitions de Pierre Le Grand (jusqu’en 1725), fondateur de Saint-Petersbourg très influencé par l’Europe, et donc désireux de se doter des toiles des grands maîtres occidentaux de l’époque. Des œuvres donc plutôt dues à des peintres hollandais, comme Van Dyck (que ne me fait toujours pas grande impression) mais aussi Jan Steen, et bien sûr Rembrandt. Son David et Jonathan est certainement l’une des œuvres les plus prestigieuses exposées ici, mais l’on trouvera également quelques toiles de Rubens. J’ai bien aimé la vérité du regard de l’acteur de Domenico Fetti.

Ce sont ensuite des œuvres provenant des immenses collections de Catherine II (jusqu’en 1796), la grande impératrice, amie de Voltaire qui se passionnait disait-on pour la disposition des tableaux à laquelle elle consacrait plusieurs heures par jour. Sachant qu’elle obtenait parfois des collections de plusieurs milliers d’œuvres, on peut se dire qu’elle avait de quoi s’occuper dans l’Hermitage. On lui doit d’ailleurs l’extension du musée. C’est selon moi dans cette partie que l’on trouve les œuvres les plus saisissantes. D’abord une nature morte, Les Attributs des Arts de Chardin, mais également un double Portrait des filles de Paul Ier d’Elizabeth Vigée-Le Brun, où l’on peut presque deviner les traits de caractère personnels des deux héritières. Le classicisme français est aussi à l’honneur avec Poussin ou les paysages de Claude Gellée, « le Lorrain ».

Alexandre Ier (jusqu’en 1825) a lui voulu ouvrir les collections impériales aux maîtres espagnols, alors peu connus hors de la péninsule ibérique. C’est une peinture que je connais d’ailleurs peu, et que je n’ai pas su apprécier dans cette exposition, mise à part les deux tableaux de Ribalta et l’Annonciation de Murillo, pour sa réalisation à la fois classique et impeccable.

Enfin Nicolas Ier, qui a su faire de l’Hermitage un musée au sens moderne comme ceux de l’Europe de l’Ouest, a également fait des acquisitions peut être moins prestigieuses mais finalement très intéressantes, dont un petit Adam et Eve chassés du Paradis d’Adriaen van der Werff, qui montre le premier couple de l’Histoire arrivant sur une terre très sombre (on les avait prévenu pour la pomme). En face, la Marie-Madeleine pénitente d’Andrea Vaccaro impressionne par l’inquiétude que l’on lit sur son visage lugubre. Dans la dernière salle, consacrée à une dizaine d’œuvres d’Edward Hau, on reste impressionné par le réalisme quasi photographique des peintures représentant… les salles de l’Hermitage au 19ème siècle !

Ainsi la boucle est bien bouclée, et vous pourrez vous balader dans la très originale collection permanente (nous y reviendrons plus tard). Au final un bon aperçu des « trésors » des Romanov, même si on regrettera légèrement le nombre assez réduit d’œuvres vraiment marquantes, surtout si l’on compare à ce que l’on peut voir dans l’Hermitage lui même.