Publié le : 27 juillet 20204 mins de lecture

Première fois que je me déplace au FRAC (Fond Régional d’Art Contemporain) d’Aquitaine pour voir une expo: il faut dire que c’est assez loin du centre ville ! Et puis, c’est si peu indiqué qu’on dirait que tout est fait pour qu’on ne le trouve pas; à croire que l’art, contemporain surtout, doit être forcément quelque chose qui se transmet dans des cercles fermés. Je ne m’attends donc à rien de particulier, ce que je sais du FRAC c’est que c’est un organisme publique qui possède des œuvres et qui en fait parfois des expos thématiques: difficile de dire donc si la qualité sera au rendez-vous.

Eh bien j’ai été plutôt surpris; la visite a été vraiment agréable. Le thème au départ c’est: le blanc. J’ai deux peurs: qu’on se retrouve dans une soirée Eddy Barclay, ou qu’on soit face à une expo un peu fourre tout. Ni l’un, ni l’autre, du début à la fin (remarquez, en 30 minutes c’est plié…), l’exposition affiche des œuvres de bonne facture avec une réelle démarche artistique, que l’on ne retrouve pas toujours dans les galeries « classiques ».

Quelques noms alléchants, Roman Opalka et sa célèbre série d’autoportraits faits tous les mois depuis près de 40 ans pour montrer le passage du temps sur l’individu (avec un exemplaire ici !), et même Jeff Koons. Ce n’est bien évidemment pas l’une de ses pièces majeures (ici des aspirateurs élevés au rang d’icônes dans une vitrine), mais donne la mesure de la qualité de l’exposition [New Hoover Convertibles… – Jeff Koons]. Celle-ci nous invite à s’interroger sur les significations et les qualificatifs que l’on accole au blanc: la pureté, la transparence, l’anonymat, le commencement etc. Et, il faut l’admettre, la plupart des œuvres restent dans une certaine cohérence.

Alors on va trouver une petite grotte qui multiplie les signes et les images de notre société actuelle (comme une transposition contemporaine des peintures rupestres) [Lascaux III – Thomas Hirschhorn], une reproduction d’une mustang toute en plastique transparent [Sans Titre – Hervé Coqueret] qui offre une curieuse dématérialisation d’un objet mythique, ou encore une superpositions de panneaux de bois peints en blanc [Constellation Alba III – Imi Knoebel], oeuvre peut être en deça de la qualité globale, par son peu d’originalité et, finalement, son intérêt plastique « relatif »…

Mes œuvres préférées auront été d’abord une vidéo (et c’est rare parce que d’ordinaire ça me gonfle), où l’on voit deux protagonistes s’affronter dans leur atelier (qui contient des draps, des éléments en bois blanc, en polystirène… Oui ne vous inquiétez pas, le thème est respecté !) le détruisant petit à petit. La formidable idée est d’avoir ensuite réalisé une compression de tout ce qui a été détruit et de l’avoir placé devant l’écran, comme un trophée à la gloire des combattants… [Stunt Lab – Florian Pugnaire]. Autre pièce qui a piqué ma curiosité, la Cellule n°2 d’Absalon, qui ressemble à un cercueil habitable, en offrant un dualisme intéressant entre les courbes de l’extérieur et le « cubisme » intérieur. Le blanc résonne ici un peu comme celui du vide, de la fin; après tout c’est la couleur du deuil au Japon…

Quand j’ai commencé à voir une petite lumière blanche… je me suis vite dirigé vers la dernière oeuvre qui m’a scotché, puisqu’elle associe art et technologie (et je trouve toujours ça dingue !): dans un caisson, une couronne de glace, comme un long tube fait de 192 petites facettes gelés. La note explicative nous apprend que c’est une imitation des coiffes florentines de l’époque de Paolo Uccelo, et qu’elle est maintenue à une température où l’eau est proche du liquide, du solide et du gazeux… [Cristal Liquide – Jean Sabrier]. Très impressionnant.